Des densités désirables pour les banlieues pavillonnaires

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    Quelles alternatives pour faire évoluer l’habitat pavillonnaire de nos banlieues ? Denis Caniaux, directeur général de l’Agence d’urbanisme Atlantique Pyrénées (Audap), explore de nouveaux modèles d’habiter plus adaptés aux enjeux contemporains pour une densité heureuse et désirable. Entretien.

    Pourquoi promouvoir un autre modèle d’habiter ?

    Les impératifs du changement climatique et l’évolution démographique de notre société nous imposent de revoir nos modes d’habiter. Propulsé dans les années 70, le rêve pavillonnaire français a un coût écologique certain, les banlieues de lotissements ayant littéralement dévoré nos champs telle une machine de guerre. Cet étalement urbain a aussi un coût économique énorme, ne serait-ce que sur la question des infrastructures, des réseaux et de leur entretien, mais aussi des modes de déplacement. 

    Il est temps de faire du modèle pavillonnaire l’objet de toutes nos attentions pour en assurer le renouvellement urbain. Nous devons travailler à leur densification ; c’est une évidence et sans doute le bon moment. Car une large partie de ces lotissements des années 80 changent actuellement de propriétaire en raison du vieillissement naturel de la population. Nous devons saisir l’opportunité de modifier ce tissu urbain.

    En quelles approches croyez-vous ?

    Il existe un mouvement spontané de densification par division parcellaire : le Build in my backyard  (BIMBY – littéralement «construire dans mon jardin»), théorisé et construit en une méthode d’accompagnement des porteurs de projets individuels. Si l’objectif est louable, j’ai quelques réserves sur cette approche car, d’une part, en ajoutant une maison sur une parcelle, on imperméabilise le sol et, d’autre part, on permet à des propriétaires, souvent déjà dans une situation aisée, de renforcer la valeur de leur patrimoine. 

    Pour autant, le renouvellement urbain des zones pavillonnaires est un chantier d’une telle complexité qu’il  n’existe pas une seule vérité, mais plusieurs alternatives. Le parc des années 70 ou 80 se compose de grands pavillons, parfois de plus de 200 m². Ils peuvent évoluer vers du petit collectif, par exemple pour du locatif en investissement. La surélévation des maisons est une autre solution qui ne consomme pas d’espace au sol. Il existe beaucoup d’exemples contemporains réussis, que ce soit dans des centre-bourgs ou des quartiers pavillonnaires, notamment à Bordeaux. Enfin, la recomposition parcellaire par les propriétaires fonciers est aussi un modèle intéressant. Elle est facilitée par l’association foncière urbaine (AFU), un outil qui permet de réorganiser la trame parcellaire pour du petit collectif. Les cahiers des charges des lotissements sont jusque-là extrêmement contraignants, mais des brèches s’ouvrent progressivement.

    Etes-vous optimiste quant à la capacité des Français à accepter un autre modèle d’habiter, davantage tourné vers le vivre-ensemble ?

    A travers la réhabilitation, le ré-usage et la surélévation, les pratiques de densification se développent déjà dans les centres-bourgs et l’Anah contribue à les financer. Les banlieues pavillonnaires doivent être le nouveau terrain d’action de la rénovation urbaine.

    Encore trop peu se sont lancées et il est vrai qu’il faut un certain temps pour que ces évolutions soient pleinement acceptées par les riverains. Il faut lier la notion d’acceptabilité à celles de légitimité et de bien commun. Car une des belles pistes qu’ouvrent notamment les opérations d’habitat partagé, participatif, ou de ré-usage, c’est la construction d’autres types de communs (un espace extérieur, un équipement partagé…). Ces pratiques viennent démontrer la plus-value des mouvements collectifs et du vivre-ensemble, y compris dans les zones pavillonnaires. Mais pour les multiplier, il faut construire un écosystème financier, juridique et opérationnel favorable.

    Il ne s’agit pas de lutter aveuglement contre la maison individuelle mais bien d’apporter des réponses aux enjeux de demain, pour rendre nos villes plus vivables et praticables.

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